Devenir correcteur

6 Oct 2023 | Mes outils | 0 commentaires

Mon métier de correctrice et de bêta-lectrice en quelques mots.

Il y a plusieurs façons d’exercer le métier de correcteur, plusieurs branches, plusieurs statuts (salarié, TAD, freelance). On peut travailler dans l’édition, dans le journalisme, dans l’industrie…

Je ne parlerai ici que du statut qui est le mien, à savoir freelance, et de mon secteur, l’édition. J’ai choisi de me spécialiser dans l’édition de romans, car c’est ce qui me passionne. Je travaille en direct avec les auteurs, pour la plupart autoédités.

J’interviens donc à divers stades des manuscrits, après l’écriture du premier jet, de la bêta-lecture à la mise en page.

Le travail de bêta-lecture est un travail de lecture et d’analyse. On remet à l’auteur une fiche de lecture et/ou son manuscrit annoté, avec des remarques sur les points forts et les points faibles, les pistes de réflexion pour la réécriture.

Le travail de correction consiste à corriger l’orthographe, la grammaire, la syntaxe, la ponctuation, la typographie, la cohérence, la fluidité…

Et je propose également une prestation de mise en page de romans.

 

Les qualités requises pour être un bon correcteur et un bon bêta-lecteur

En dehors d’un évident goût pour la langue française et la littérature, il faut selon moi posséder et travailler un certain nombre de qualités :

Être diplomate dans la façon de dire les choses à l’auteur, car partager ses écrits est quelque chose d’intime, même en fiction. Ça paraît évident, mais ça demande de bonnes compétences en communication pour que l’auteur ne se sente pas jugé et pour ne pas le blesser involontairement.

Être humble, car les choses sont rarement noires ou blanches, et les textes appartiennent à leurs auteurs. Il faut savoir mettre son expertise au service de l’auteur sans se poser en donneur de leçon. Il faut aussi être prêt à douter de tout, à commencer par ce que l’on croit savoir. Et c’est beaucoup plus difficile qu’on le pense, j’ai déjà laissé passer des fautes parce que je n’avais pas vérifié quelque chose qui me semblait évident (je me souviens notamment de « deuil prénatal » qui ne m’avait absolument pas choquée, alors que l’on parle de « deuil périnatal »).

Être rigoureux et patient, car c’est un métier lent. Déchiffrer et analyser demandent du temps et une bonne capacité de concentration, particulièrement pour la correction, qu’il faut maintenir sur plusieurs milliers de signes.

Avoir une bonne culture générale et vouloir la développer, être curieux, aimer apprendre. Ce sont des métiers dont on ne fera jamais le tour.

 

Les formations pour devenir correcteur freelance

La formation n’est pas obligatoire pour exercer, mais elle est nécessaire pour proposer un travail de qualité. Correcteur, c’est beaucoup plus pointu que ce qu’on croit, et c’est bien plus que corriger des accords et du vocabulaire. Ce sont des connaissances en typographie, en orthotypographie, en difficultés de la langue française. C’est de la réflexion, de la logique, de la recherche.

Le certificat Voltaire et la certification Le Robert ne sont pas des formations de correcteur. Ils attestent d’un niveau d’orthographe, mais le spectre du correcteur dépasse largement celui de ces certificats.

Il n’y a pas de diplôme officiel de correcteur, mais des formations sérieuses existent.

Etudier pour devenir correcteur diplômé

Les formations existantes

L’ACLF (l’Association des correcteurs de langue française) a répertorié les formations particulièrement complètes et exigeantes, reconnues par les professionnels, qui se déroulent en centre de formation et en entreprise :

Se former – ACLF (associationdescorrecteurs.fr)

Il en existe d’autres, assez récentes, qui se déroulent en ligne :

Devenir correcteur-relecteur-réviseur – MD Mots

École Française de Lecteur-Correcteur | Formation à Distance (eflc.fr)

Mon parcours

Je n’ai pas toujours été correctrice. J’ai travaillé vingt ans dans l’industrie après des études de commerce international. Pour devenir correctrice, j’ai d’abord pratiqué bénévolement, puis j’ai passé le certificat Voltaire pour évaluer mon niveau.

Ensuite, j’ai suivi pendant un an la formation par correspondance du CEC (Centre d’Écriture et de Communication, formation qui a fermé ses portes en 2022), à raison de deux devoirs à rendre par mois ainsi qu’un examen final.

J’ai également suivi une formation business de trois mois (la BSB Académie de TheBBoost), une formation de mise en page de roman avec InDesign chez Elle Edite, des formations en techniques narratives chez Cyril Destoky, et plein de petites formations comme la rédaction de pages de ventes, la construction d’un espace de travail sur Notion…

 

Un mot sur le bénévolat ou les petits prix

J’ai commencé par le bénévolat, et je pense que c’est une très bonne école pour se faire une idée du métier, mettre un pied dans le milieu, se faire des premiers contacts.

Toutefois, il faut se limiter à une poignée de manuscrits et bien expliquer la situation à l’auteur. C’est gratuit parce que c’est votre première correction. C’est moins cher parce que vous êtes en cours de formation. D’une part, pour éviter la concurrence déloyale envers les professionnels qui facturent ces services à leur vrai prix. D’autre part, parce que lorsqu’on commence à faire les choses gratuitement ou pas cher, c’est difficile d’en sortir et de faire comprendre la valeur de son travail. Même lorsque j’accorde une remise exceptionnelle, pour une offre de lancement par exemple, le devis mentionne toujours le prix de départ, le montant de la remise et le pourquoi de la remise.

Une fois que vous êtes certifié, mettez le syndrome de l’imposteur au placard, et facturez vos services comme n’importe quel professionnel.

 

Comment trouver ses premiers clients en tant que correcteur ?

Il y a à mon sens une grosse prise de conscience à avoir avant de se lancer : quand on est freelance, on dirige une entreprise, petite, certes, mais une entreprise. Ce qui veut dire la gérer comme une entreprise. On n’est pas seulement correcteur, on doit aussi être directeur, vendeur, comptable…

Il y a deux grandes voies pour trouver des clients : l’inbound marketing, et l’outbound marketing.

Inbound marketing

L’inbound marketing est une stratégie qui consiste à faire venir le client à soi. Pour cela, on peut miser sur le personal branding, c’est-à-dire la promotion de son image, pour créer un lien de confiance avec les auteurs. Être actif sur les médias sociaux, créer des contenus gratuits pour promouvoir ses services, travailler sa visibilité et se positionner comme expert, travailler le SEO de son site internet…

L’inbound marketing repose sur quatre piliers : se rendre visible, convertir les visiteurs en leads, c’est-à-dire des gens qui nous connaissent et nous suivent via nos réseaux sociaux ou une newsletter, convertir les leads en clients, puis les fidéliser.

Outbound marketing

À l’inverse, l’outbound marketing va solliciter directement les personnes, via la prospection, la publicité, la distribution de flyers… C’est une approche qui est en perte de vitesse, notamment le marketing de masse qui est trop peu personnalisé, mais qui à mon sens est complémentaire de l’inbound.

Il faut sélectionner les maisons d’édition et les auteurs pour lesquels vous avez envie de travailler, cerner leur personnalité, leurs besoins, et faire une proposition personnalisée. C’est fini le temps où l’on envoyait des dizaines d’e-mails identiques.

Attention au piège d’envoyer des CV : un freelance n’est pas un salarié. Il envoie un flyer présentant ses services et ses tarifs, il ne postule pas !

 

Quelle stratégie choisir ?

Les deux approches sont complémentaires. Dans tous les cas, les débuts peuvent être longs et les premiers mois, ressembler à une traversée du désert. Ensuite, le bouche-à-oreille prend le relais. Il est essentiel de récolter les avis de ses clients et de les publier sur son site internet, ses réseaux sociaux. La preuve sociale est indispensable. La persévérance est de mise.

Il ne faut pas compter vivre tout de suite de son activité (à de rares exceptions près). Pour ma part, j’ai préféré conserver mon emploi salarié à mi-temps le temps de faire grossir mon entreprise. D’autres solutions sont possibles, se constituer un matelas avant de se lancer, se serrer la ceinture les premiers mois… c’est propre à chacun selon sa situation.

 

Une semaine type chez moi

Les tâches principales

Je suis en micro-entreprise, j’ai donc le travail sur les manuscrits, mais également l’administratif (devis, factures, e-mails…) et tout ce qui gravite autour de la recherche de clients (site internet, création de contenus, communication, prospection…), sans oublier la formation continue, que ce soit au niveau du métier (formations complémentaires, comme la mise en page, les techniques narratives…), mais aussi des formations business (diriger une entreprise, connaître les techniques marketing…)

Une semaine type chez moi c’est, du lundi au jeudi, quatre heures de correction le matin, et l’après-midi, trois heures de bêta-lecture ou de mise en page, plus des petits créneaux pour répondre aux mails, aux messages sur Insta, faire des devis… Le vendredi, de l’administratif, des formations, des projets de développement, de la création de contenus pour les réseaux sociaux et le blog. Parfois quelques heures le samedi pour rattraper un éventuel retard.

En réalité, ce sont des semaines qui débordent, des semaines plus cool. Quand je n’ai pas de bêta-lecture ou de mise en page l’après-midi, je peux profiter de passer plus de temps en formation ou en réflexion business, ou simplement me reposer en prévision de semaines plus chargées. Pareil pour les corrections le matin, mais c’est beaucoup plus rare que je n’aie pas de correction sur le feu !

 

Le temps de travail

C’est difficile de se débarrasser de 20 ans d’habitudes en salariat, et c’est un vrai apprentissage de se débarrasser des cadres imposés en entreprise : horaires, temps de travail…

Quand on est freelance, on peut, et on doit s’organiser comme cela nous plaît. On raisonne plutôt en objectif qu’en temps de travail. Bien sûr, pour atteindre un chiffre d’affaires que l’on s’est fixé, il y a un certain nombre d’heures minimum à travailler. Mais le cadre est beaucoup plus souple. On peut se permettre un ajustement de son emploi du temps en fonction de son énergie, faire des semaines de 45 heures quand on est au taquet et des semaines de 20 heures quand on est tout mou.

Chez Plume en main par exemple pour une semaine de 36 heures, ça peut donner ça :

Semaine type chez Plume en main, emploi du temps d'un correcteur

(En vert, ce sont des prestations clients)

Donc 60 % du temps sur des manuscrits, 40 % sur des tâches annexes. C’est assez représentatif d’une semaine type, mais ça varie.

La semaine précédente, je n’avais travaillé que 32 heures, dont 95 % sur des manuscrits. Parfois c’est 50/50. Parfois j’ai des semaines sans manuscrit. Parfois j’ai des semaines à 45 heures.

D’un correcteur à l’autre, ça change.

 

Combien je gagne en tant que correctrice et bêta-lectrice ?

L’ACLF (l’Association des correcteurs de langue française) recommande un taux horaire minimum de 25 € de l’heure pour les freelances. C’est ce que j’ai choisi de facturer les deux premières années, puis j’ai augmenté à 30 €. Le marché est très disparate. Certains facturent une misère, d’autres arrivent à facturer beaucoup plus, plutôt dans le secteur industriel.

Au montant facturé il faut retirer les cotisations sociales, les charges et investissements, l’épargne, car il n’y a ni congés payés ni chômage (et l’activité n’est pas lisse toute l’année) et compter le fait qu’on ne facture que les heures de prestation alors qu’on travaille quasiment le double pour faire tourner l’entreprise.

 

Des chiffres concrets

Personne ne dit combien il gagne, en France c’est tabou, mais moi j’aurais aimé savoir à quoi m’attendre, savoir comment je me situais par rapport à mes collègues.

Alors voilà mes chiffres en toute transparence : j’ai fait 2 000 € de chiffre d’affaires la première année, 13 000 € la deuxième année, et je devrais faire entre 20 000 et 22 000 € pour cette troisième année.

22 000 € de CA, ça veut dire 4 900 € de cotisations sociales (coucou l’URSSAF ❤️).

Cette année, j’ai dépensé 6 000 € entre les applications et logiciels (notamment les abonnements Adobe, Canva, Notion, mon outil de compta…), les déplacements professionnels (l’année dernière je suis allée à un séminaire business, cette année à deux salons du livre et une rencontre entre correcteurs), la prestataire pour mon site internet, l’hébergement de mon site, les formations, la publicité.

Ce sont donc 11 000 € de bénéfices, à partager entre le salaire, l’épargne et la trésorerie (je distingue l’épargne et la trésorerie dans le sens où pour moi la trésorerie est disponible et sert à payer les charges et lisser les revenus, alors que l’épargne n’est pas touchée, c’est une sécurité). Ce partage est un choix personnel qui dépend de nos besoins financiers pour vivre, notre besoin de sécurité, la régularité des rentrées d’argent… J’ai eu des mois à 0 €, à 500 €, à 4000 €. Il faut apprendre à gérer ça.

Rapporté à mes heures travaillées, je suis à 16 € brut de l’heure, je tombe à 8 € net, avant impôts.

Pour 2024, j’ai encore pas mal d’optimisations à faire, notamment au niveau de mes dépenses, et je vais continuer de développer ma visibilité et mon chiffre d’affaires pour augmenter mes revenus.

 

Qu’est-ce que j’aime le plus dans mon métier ? Et pourquoi freelance ?

J’ai toujours été passionnée de lecture. Participer à l’élaboration des livres est pour moi une chance et un émerveillement. J’ai la chance de travailler avec des auteurs qui manifestent beaucoup de reconnaissance. C’est quelque chose qui m’avait toujours manqué dans ma carrière professionnelle, alors que, pour moi, c’est essentiel de me sentir vraiment utile.

L’avantage d’être indépendante, c’est que j’organise ma vie comme je l’entends et je suis maîtresse de toutes les décisions professionnelles : les missions que j’accepte, les auteurs avec lesquels j’ai envie de travailler, la direction que je veux prendre, les possibilités d’évolution, d’adaptation.

Cependant, l’aventure entrepreneuriale est parfois difficile mentalement, notamment les premiers mois, le temps de trouver des clients. Mais ce n’est pas beaucoup plus facile après, chaque étape apporte son lot de questions et d’inquiétudes. Il y a les remises en question, la gestion de la productivité (qui est tout sauf linéaire), les projets, l’incertitude de l’avenir… Mais ce sont aussi des challenges qui font grandir. Je n’échangerais ma place pour rien au monde.

 

L’avenir du métier de correcteur avec l’émergence des outils informatiques et des intelligences artificielles.

Je pense qu’il y aura toujours des gens qui écriront, et tant que des gens écriront il y aura des correcteurs. C’est l’un des plus vieux métiers du monde.

Il faut par contre savoir vivre avec son temps et suivre les évolutions technologiques. Avant, on corrigeait essentiellement sur papier (je n’ai pas connu cette époque), aujourd’hui on travaille beaucoup en ligne. Avant, on travaillait pour les maisons d’édition, aujourd’hui avec l’autoédition on peut travailler directement avec les auteurs. La langue française évolue aussi. Il faut rester attentif et s’adapter.

Face aux outils informatiques et l’intelligence artificielle, il faut apprendre à mettre en avant sa plus-value en tant qu’humain. Les logiciels de correction sont de plus en plus performants, certes, mais justement, reposons-nous sur les machines, supervisons leur travail, et concentrons notre énergie sur des choses plus gratifiantes : travailler les subtilités, accompagner les auteurs, améliorer les textes.

Tout sera peut-être à réinventer. Profitons-en pour créer le métier qui nous plaît et qui sert notre vision.

Si vous avez trouvé une faute d’orthographe, informez-moi en sélectionnant le texte et en appuyant sur CTRL+Entrée.

Hello !

Je suis Emmanuelle

…et j’ai plus d’une corde à mon arc pour vous accompagner dans votre aventure éditoriale : correctrice, bêta-lectrice et maquettiste, je travaille autant au service d’auteurs que de maisons d’édition.

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